Soutenance de thèse de Marianne Peyrotte

Examiner les variations des empathies des enseignants depuis la perspective de la formation initiale


Marianne Peyrotte, doctorante du CREN, a soutenu sa thèse en sciences de l'éducation et de la formation le lundi 1er juillet 2024.

Résumé :

Plusieurs recherches récentes suggèrent que l’empathie des enseignants pourrait jouer sur la satisfaction au travail de ces derniers, ainsi qu’améliorer les compétences psychosociales et les résultats scolaires des élèves (Andreychik, 2019 ; Cornelius-White et al., 2017 ; Tavant, 2021). Cependant, fort peu d’études à ce jour s’attachent à décrire et comprendre en quoi les capacités d’empathie des enseignants peuvent varier et évoluer, à la hausse comme à la baisse. Cette thèse propose d’examiner la manière dont les expériences socioculturelles, vécues par les enseignants au cours de leur parcours de professionnalisation, influencent leur(s) empathie(s), et également l'effet de ces empathies sur leur propre bien-être. Les éléments de théorisation retenus proviennent d’une revue de la littérature systématisée, réalisée avec la méthodologie PRISMA 2020. Analysant le niveau de preuve de 240 études incluses à partir d’une recherche, en anglais, d’occurrences des termes « empathie » et « enseignant », elle a pour dessein de développer un modèle conceptuel. Ce dernier s’articule autour de plusieurs axes : « relationnel », de « distance » et d’« expérience », eu égard aux contextes scolaires et sociaux. En réponse au manque de consensus théorique autour du terme « empathie », nous choisissons de retenir une définition exhaustive, inspirée des travaux de Batson (2009), en distinguant onze interprétations différentes. Après cet état de l’art, la thèse se concentre sur trois questions de recherche : la première, méthodologique, révèle la présence de biais affectifs, cognitifs et motivationnels dans l'évaluation de l'empathie utilisant des tâches dessinées et le Basic Empathy Scale. L'analyse de 4 tâches d'empathie sous forme de comic-strips permet d'identifier principalement des biais liés au genre. Par ailleurs, une comparaison des niveaux d'empathie entre étudiants en éducation marocains et français met en lumière une différence de scores de 10%, attribuable à des biais interculturels, exacerbés par l’usage du français comme langue de test au Maroc. Les résultats d’un second ensemble d’études, répondant à la seconde question avec plus de 3000 enseignants, mettent en évidence une tendance à la hausse de l’empathie tout au long de la formation initiale. De surcroît, le type d'établissement, le niveau d'enseignement, le cursus de formation et le choix de pratiques pédagogiques coopératives seraient en lien avec ces variations d’empathie des enseignants, suggérant également l'émergence d'une « empathie collective » au- delà des aspects individuels. Enfin, la troisième question examine les relations entre empathie, autocompassion et bien-être subjectif de type hédonique des enseignants. Les résultats indiquent que la nature du lien entre l’empathie des enseignants et leur propre bien-être pourrait être corrélée négativement. Avec une empathie affective élevée, leur tendance à l’autocompassion serait moindre, et ces facteurs, pris ensemble, nuiraient à leur bien-être. La discussion générale offre une réflexion autour de trois associations d’idées fréquemment utilisées par la littérature, à savoir les genres et l'empathie en sciences de l'éducation, la distinction des compétences d’empathie entre étudiants médecins et - enseignants, et le bien-être et les gestes professionnels en début de carrière. Cette thèse propose par conséquent des pistes intégrant l’empathie à la formation des enseignants pour les soutenir dans la prise en main progressive de la classe, notamment par le biais d’une option en Master Métiers de l’enseignement.

Mis à jour le 04 juillet 2024.